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Cap21 LRC Toulouse

echos du reseau lercitoyen

L’info environnementale : une info cruciale

29 Janvier 2021, 16:02pm

Publié par Corinne Lepage

Etre bien informé est aussi un acte de citoyenneté.

Etre bien informé est aussi un acte de citoyenneté.

Vitale pour éclairer les débats de société, l’information environnementale est menacée pour des motifs pas toujours avouables, rappelle l’ancienne ministre de l’Environnement, Corinne Lepage.

 

L’information est dans tous les domaines un secteur-clé et, le développement des GAFA et l’exploitation des données en est le meilleur exemple si certains en doutaient encore. Mais, dans le domaine de l’environnement, elle est cruciale car les débats qui sont souvent d’ordre scientifique avant d’être juridique ne peuvent se dérouler que pour autant que l’information de base est partagée.

masquer l'information essentielle

Il ne faut donc pas s’étonner du combat mené en permanence, malgré les conventions d’Espoo et d’Aarhus contre la transparence dans le domaine de l’information environnementale. Secret des affaires, risques terroristes, tous les moyens sont bons pour essayer de priver les associations, les citoyens et même les collectivités locales des informations indispensables pour connaître les niveaux de pollution quelque soient les milieux et les niveaux de destruction des espèces et des espaces.

La disparition en France de l’institut français de l’environnement (Ifen), en 2003, a sonné le glas d’une information indépendante mais aussi de la fourniture de tous les éléments d’information nécessaires sur la situation environnementale en France au niveau communautaire puisque l’Ifen était le point focal de l’agence européenne de l’environnement (AEE).

une faiblesse française

Tout ceci explique l’importance que revêt la presse environnementale, celle qui est en capacité de trouver les informations, de les décoder et de les expliquer. La presse environnementale française est relativement modeste, voire très modeste et la disparition du JDLE est très dommageable parce qu’elle réduit encore cette presse à un moment où la communication tient lieu de politique et/ou les sujets environnementaux sont devenus des sujets absolument majeurs pour l’ensemble de la population et l’ensemble des activités.

Espérons seulement que cette disparition suscitera de nouvelles vocations, sous des formats qui pourraient qui peuvent être différents mais avec l’objectif de poursuivre inlassablement le veau d’information face à de grands lobbys qui possèdent globalement la presse et sont généralement très pressés de voir disparaître une presse indépendante surtout lorsqu’elle aborde les sujets qui fâchent…

 

Corinne Lepage

Source : Journal de l'environnement

https://www.journaldelenvironnement.net/article/l-info-environnementale-une-info-cruciale,113848

 

 

 

 

 

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Comment libérer la transition écologique en France ? [Café-Débat Comwatt TV - @corinnelepage ]

21 Octobre 2020, 10:46am

Publié par Corinne Lepage

Quelle énergie ! Corinne Lepage est vraiment très inspirante et j'espère que son message va se diffuser largement. Il le mérite vraiment.
 

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Penser l’après Covid-19 : vers quels modèles économiques se tourner ?#1 L’économie planétarisée

29 Avril 2020, 13:42pm

Publié par Corinne Lepage

Penser l’après Covid-19 : vers quels modèles économiques se tourner ?#1 L’économie planétarisée

Depuis le début de la crise liée à l'épidémie de coronavirus, l'économie française est grippée. Dans ce contexte de fragilisation économique, Techniques de l'Ingénieur s'est entretenu avec plusieurs personnalités qui expliquent la crise et imaginent les modèles futurs. Rencontre avec Corinne Lepage, ancienne ministre de l'Environnement, pour qui l'économie devrait être à l'avenir plus « planétarisée » que mondialisée.

Penser l’après Covid-19 : vers quels modèles économiques se tourner ?#1 L’économie planétarisée

Face à la crise économique provoquée par l’épidémie de coronavirus, Corinne Lepage a un avis clair. Cette avocate, ancienne ministre de l’Environnement et auteure chez LexisNexis, estime que l’État aurait pu mieux prévenir la propagation de la maladie. En pensant à une reprise économique future, Corinne Lepage espère que les grands enjeux écologiques seront pris en considération.

Techniques de l’Ingénieur : Une crise telle que celle que l’on vit aujourd’hui était-elle prévisible ?

 

Corinne Lepage : Une crise sanitaire était prévisible depuis l’épidémie de H1N1, mais celle-ci et dans les conditions exactes que nous vivons aujourd’hui, je ne crois pas. Pourtant, déjà à l’époque, il était très clair qu’il y aurait d’autres épidémies. On sait également que le dérèglement climatique entraîne un risque épidémique supplémentaire dans la mesure où la fonte du pergélisol [sol gelé des régions arctiques, NDLR] libère des molécules susceptibles de faire apparaître des maladies dont nous ignorons encore l’existence.

Le secteur médical était-il suffisamment préparé ?

 

Pour des raisons budgétaires, ce gouvernement a refusé de faire les investissements qui étaient nécessaires dans les hôpitaux. Si au fil des années, on a fermé 100.000 lits dans les hôpitaux, ce n’est pas pour des raisons des santé, mais pour des raisons budgétaires. Cela est inadmissible.

Cette crise met à mal notre système économique. Qu’en conclure ?

 

Il est clair qu’il y aura un avant et un après. Et nous avons une chance historique qu’il y ait un après qui réduise les risques auxquels nous sommes exposés. Le grand sujet, c’est de savoir comment on repart.

Donc, comment faire évoluer notre modèle économique ?

 

D’abord, je pense que nous avons besoin de réfléchir sur l’organisation de l’État et la manière dont nous utilisons nos fonds publics. Nous sommes un pays hyper fiscalisé, nous avons plus de 50 % de notre PNB qui repart à l’État. Une partie part en redistribution sociale, ce que je ne remets pas du tout en cause. L’autre partie sert au fonctionnement de l’État. Quand on regarde les schémas qui sont faits autour du monde de la santé, on se rend compte qu’une immense partie des fonds finance des organismes administratifs qui n’ont rien à voir avec le soin direct aux patients. Donc il faut repenser notre organisation, et je peux dire la même chose pour la justice et l’éducation nationale. Il est urgent de remettre le service public au cœur des priorités, et non l’organisation administrative qui l’entoure. L’argent doit aller aux hôpitaux, à la recherche, et aux personnels qui doivent être payés convenablement.

Ensuite, il serait nécessaire de se poser la question de l’échelle des salaires. On se rend compte que ce sont les gens sous-payés qui tiennent la société. Ce sont le monde médical, les professeurs, les livreurs, les caissiers, les travailleurs du BTP, tous ce qui fait que la société ne peut plus fonctionner si ces gens ne travaillent pas. Pourtant, ce sont les gens qui, dans notre pyramide sociale, sont les moins bien considérés, et les plus mal payés. Bien sûr, il faut garder à l’esprit la notion de compétitivité, car on ne peut pas augmenter nos coûts pour ne plus pouvoir vendre nos produits et services à l’étranger, c’est une évidence. Mais simplement, il y a une échelle des rémunérations à revoir.

Idéalement, dans quel contexte cette restructuration économique devrait-elle être mise en place ?

 

Deux écoles s’affrontent de manière binaire. Or, le binaire est toujours dangereux. D’un côté, il y a les gens qui disent qu’il faut mettre de côté toutes les normes sociales et environnementales au profit du business pur et dur. De l’autre, la planète écolo affirme que le moment est venu de complètement changer notre fusil d’épaule, et de repenser une organisation économique totalement différente. Mon cœur penche évidemment pour cette deuxième solution. Mais je la pense très difficile à mettre en œuvre dans l’économie très dégradée qui va être la nôtre. Donc, il me paraît essentiel de définir des priorités. On peut éviter d’investir dans ce que l’on sait être contraire au long terme. Je veux dire par là que le redéploiement économique doit se faire en considération des impacts sur le climat, la biodiversité, la santé, et la lutte contre la fraude. Les activités économiques qui sont mauvaises pour le climat, la biodiversité et la santé ne doivent pas être encouragées. Ainsi, nous pourrions entrer dans un cercle beaucoup plus vertueux.

Cette crise annonce-t-elle le déclin de la mondialisation économique ?

 

Je pense que la mondialisation comme on l’a connue, qui est à l’origine des inégalités, il faut lui tourner le dos. Non pas pour revenir à une fermeture des frontières et à un protectionnisme, mais pour revenir à beaucoup plus d’autonomie territoriale. On ne peut plus faire fabriquer tous nos médicaments en Chine. On ne peut plus dépendre des autres sur tout ce qui est vital. Donc, penser en termes d’autonomie alimentaire, sanitaire, énergétique, digitale, me paraît absolument essentiel. Je n’envisage pas nécessairement une autonomie à l’échelle nationale. Il faut une échelle d’autonomie du local à l’européen. L’échelle européenne devrait être la bonne échelle pour l’industrie, à la condition de faire disparaître ce qui ne marche pas en Europe. En revanche, il faut avoir conscience de l’interdépendance que nous avons les uns envers les autres et des besoins de solidarité. Et la crise du Covid-19 le montre bien. Il est essentiel de prendre en compte ce qui a bien marché à un endroit. En ce sens, il faut une vision planétaire. Le dérèglement climatique, c’est planétaire, la biodiversité, c’est planétaire. Et on a compris que la santé, c’est également planétaire. Donc on a besoin de planétarisation, c’est-à-dire de penser à l’échelle de l’humanité, les sujets qui concernent toute l’humanité.

 

 

Chaymaa Deb dans Entreprises et marchés

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Coronavirus et pollution de l'air: le monde économique joue toujours plus avec notre santé

27 Avril 2020, 10:11am

Publié par Corinne Lepage

La pollution atmosphérique devient le symbole de ce que nous sommes en train de vivre avec la crise du covid-19.

Un Chinois porte un masque de protection alors qu'il passe à l'heure de pointe dans le quartier central des affaires de Pékin en Chine, le 13 février 2020.

Un Chinois porte un masque de protection alors qu'il passe à l'heure de pointe dans le quartier central des affaires de Pékin en Chine, le 13 février 2020.

La question de la pollution de l’air, qui devrait être traitée comme un sujet de santé public majeur (48.000 morts par an en France), et qui est très généralement traitée par le mépris, revient dans le débat public comme un boomerang.

Ce sujet est très irritant, pas seulement pour les poumons et les bronches mais surtout pour les grands lobbys de la pétrochimie, de l’agriculture, de l’automobile notamment. Sans s’appesantir sur la loi sur l’air, qui va fêter ses 24 ans mais dont l’application reste à géométrie très variable, force est de constater que plan national santé/environnement après plan national santé/environnement, condamnation de la France après condamnation de la France par la justice communautaire, la progression dans la lutte contre la pollution atmosphérique reste très modeste… dans une indifférence quasi générale de la part de l’État qui, malgré le fait qu’il s’agit d’une des causes majeures de décès dans ce pays, (deux tiers du nombre des morts par le tabac qui fait l’objet de campagnes étatiques permanentes) n’agit peu ou pas.

On aurait pu penser qu’avec le Covid-19, le sujet de la pollution de l’air perdait de son intérêt. En effet, la baisse drastique de la circulation automobile et de l’activité industrielle ont effectivement réduit massivement la pollution par le dioxyde d’azote, les Nox et autres composés aromatiques polycycliques. Même si les conditions printanières, que nous vivons, ne permettent pas aujourd’hui de constater par rapport aux années précédentes une baisse significative des particules fines liée à l’augmentation du chauffage résidentiel et au maintien des activités agricoles, si on compare avec des météos similaires, nous aurions franchi les seuils de pic de pollution de nombreux jours en mars et avril. Et, de fait, des pics de pollution aux PM2.5 ont été constatés à de nombreuses reprises notamment dans la région parisienne.

 

Le court-termisme et la cupidité conduisent ceux qui portent une part de responsabilité dans les crises que nous vivons à accélérer le mouvement en se dissimulant derrière les exigences de la crise sanitaire.

 

Or, le sujet de la pollution de l’air devient un sujet central pour deux raisons qui conduisent à des politiques diamétralement opposées:

- les liens entre pollution atmosphérique et Covid-19 qui imposent un renforcement de la législation et surtout de son application

- les efforts massifs faits par le MEDEF, l’AFEP et divers secteurs économiques pour obtenir un abaissement des normes en lien du reste avec le lobbying pour réduire les obligations en termes climatiques, les deux sujets se croisant souvent.

Tout d’abord, les liens entre pollution atmosphérique de fond et sensibilité aux maladies à effet pulmonaire sont connus depuis des décennies. Mais il y a beaucoup plus. En effet, une série d’études récentes (Harvard, 2 études italiennes,1 étude chinoise) met en évidence les liens entre présence massive de coronavirus et pollution atmosphérique et également le rôle que les particules fines (PM10  et PM2.5) pourraient jouer dans l’exposition au coronavirus (voir également deux articles du Monde et un article du Guardian). Or, ce lien que le Conseil d’État a consacré dans l’ordonnance rendue le 20 avril 2020 met en évidence, compte tenu de l’absence de pollution habituelle, l’importance de la pollution agricole, à la fois celle des épandages, source d’ammoniac et de particules fines et celle des pesticides, le tout représentant globalement près de 30% de la pollution atmosphérique habituelle. Or, la puissance du lobby agricole est suffisamment forte pour obtenir en ces temps de coronavirus que non seulement aucune contrainte habituelle ne lui soit opposée mais encore que des dérogations massives puissent être autorisées en ce qui concerne en particulier les pesticides, contribuant ainsi à fragiliser encore davantage nos concitoyens à l’exposition au covid-19. C’est bien entendu une absurdité car le constat des liens particuliers avec le covid-19 ajouté à la catastrophe sanitaire que constitue en temps normal la pollution atmosphérique devrait conduire nos gouvernants à mettre en place des politiques drastiques. C’est bien entendu dans l’intérêt sanitaire des populations mais c’est aussi dans l’intérêt économique de la nation. Mais, visiblement, cet argument rationnel n’a pas convaincu.

Dans le même temps, les lobbys s’affairent tant auprès de la commission européenne que du gouvernement français pour prendre prétexte du covid-19 pour obtenir un allègement des normes concernant la pollution, mais aussi concernant les efforts à faire pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, les deux sujets pouvant souvent se recouper. Ainsi, le courrier adressé à Élisabeth Borne par le MEDEF comme les prises de position à l’échelle européenne des industries de l’automobile, qui sont à ce jour les positions connues, mais, il est fort à parier qu’il y en a bien d’autres, témoignent de ce qu’une partie du monde économique refuse d’admettre le rôle de la lutte contre les pollutions et en particulier la pollution atmosphérique dans la prévention sanitaire alors même que ce sujet devient central non seulement pour les politiques publiques mais également pour les entreprises privées. D’une certaine manière, une partie du monde économique est donc en train de marquer consciencieusement contre son camp, sans parler bien entendu du fait qu’il bute, et cela de manière tout à fait volontaire, contre le camp de l’intérêt général.

La pollution atmosphérique devient d’une certaine manière le symbole de ce que nous sommes en train de vivre. De même que la folie de l’humanité et l’avidité de certaines multinationales ont fait que les conséquences tragiques du dérèglement climatique sur l’arctique se traduisent par des forages pétroliers qui augmentent encore le dérèglement climatique, de même le court-termisme et la cupidité conduisent ceux qui portent une part de responsabilité dans les crises que nous vivons à accélérer le mouvement en se dissimulant derrière les exigences de la crise sanitaire !

C’est tragique.

 

Corinne Lepage

Avocate, ancienne ministre de l'Environnement, députée européenne de 2009 à 2014, Présidente de CAP21/Le Rassemblement Citoyen

 

Source : HuffingtonPost

https://www.huffingtonpost.fr/entry/coronavirus-et-pollution-de-lair-le-monde-economique-joue-toujours-plus-avec-notre-sante_fr_5ea694acc5b6dd3f90874a7d

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Vu sa gestion absurde du coronavirus, ce n'est pas de l'État que dépendra le succès du déconfinement

18 Avril 2020, 03:57am

Publié par Corinne Lepage

Les préfets n’ont rien de mieux à faire que de poursuivre les maires qui prennent des arrêtés pour obliger à porter des masques, alors que dans la crise du coronavirus, les collectivités s’adaptent plus vite.

Une femme porte un masque pour se protéger du coronavirus et passe devant une banderole de l'artiste Regis Leger alias Dugudus, remerciant les soignants, les commerçants, les forces de l'ordre, le personnel de la poste et les agriculteurs, le 16 avril 2020 à Paris.

Une femme porte un masque pour se protéger du coronavirus et passe devant une banderole de l'artiste Regis Leger alias Dugudus, remerciant les soignants, les commerçants, les forces de l'ordre, le personnel de la poste et les agriculteurs, le 16 avril 2020 à Paris.

Les relations entre collectivités et État depuis les lois de décentralisation sont très souvent conflictuelles et se focalisent généralement sur trois points: la clarification des compétences, l’allègement des contraintes normatives et les relations financières. La loi NoTRe de 2015 devait améliorer les relations entre État et collectivités, pourtant un sujet devient récurrent dans ces conflits, celui de la protection des populations et notamment les sujets de santé publique.

Soucieux de l’inquiétude de leur population au regard d’un certain nombre de technologies ou de produits, de nombreux maires ont été conduits à prendre des arrêtés pour réduire, encadrer voire interdire un certain nombre d’agissements. Il y avait eu des précédents voici une dizaine d’années avec les arrêtés anti-OGM que l’État avait violemment combattus, avec le plus souvent des succès devant les juridictions administratives. Le fait est que les maires ont finalement gagné puisque la France ne cultive pas d’OGM. Ils avaient simplement anticipé une orientation qui paraissait inéluctable dans la mesure où ces produits n’avaient strictement aucun intérêt pour les consommateurs et les populations. 

La bataille a continué depuis 2017 avec l’expansion du compteur Linky contre lequel de très nombreux maires sont intervenus pour interdire leur pose de force sur leur territoire. Fidèle allié de l’État, le conseil d’État a tranché en sa faveur en considérant que les maires n’avaient aucune compétence pour agir en la matière car la compétence avait été transférée aux communautés de communes et d’agglomération. Ce faisant, il n’a pas eu à trancher sur le fond et en particulier les questions liées à la santé (en particulier l’impact sur les électro-sensibles, les hypertendus, les diabétiques etc.), à l’utilisation abusive des données (reconnue ultérieurement), au risque d’incendie et surtout à l’absence totale d’intérêt pour 98% des consommateurs. Heureusement, les tribunaux judiciaires ont opportunément rappelé que le domicile était inviolable et que Enedis et ses sous-traitants ne pouvaient y pénétrer de force. De plus, certaines communes ont directement traité avec Enedis et ont obtenu que ne soient posés les compteurs que chez les personnes qui l’acceptaient. En conséquence, une fois encore, les maires ont peut-être perdu devant le tribunal administratif et le conseil d’État mais ont néanmoins fait progresser le sujet et défendu leur population.

Avec la question des arrêtés anti-pesticides, le sujet a changé de dimension, la question sanitaire était cette fois-ci indiscutable tant les études accablantes pour la toxicité des pesticides et en particulier du glyphosate se sont accumulées au cours des dernières années. Les tribunaux administratifs ne s’y sont du reste pas trompés puisque même si certains ont donné tort aux communes, cependant que d’autres leur donnaient raison, ils ont quasiment tous admis la toxicité du produit et la carence de l’État à protéger la population. Dans ces conditions, pourquoi avoir validé les déférés préfectoraux contre les arrêtés du maire? Tout simplement parce que l’État, effectivement titulaire d’une police spéciale en matière de pesticides, a voulu faire juger que même lorsque cette police n’était pas exercée convenablement (ce que le Conseil d’État avait estimé dans un arrêt précédent de juin 2019), les maires n’étaient pas pour autant autorisés à protéger leur population. C’est bien entendu gravissime et témoigne d’une double erreur juridico-politique:

- D’une part, la prétention d’un État qui fait de la prévention sanitaire un objectif plus que subsidiaire à interdire aux autorités publiques locales au motif qu’elles seraient “incompétentes”, “non-sachantes” de mettre en place des politiques de prévention

- Une fausse interprétation du principe de précaution qui en quelque sorte ne trouverait plus à s’appliquer à partir du moment où l’État aurait décidé de ne pas en faire usage. 

Le sujet du COVID-19 est une illustration à la puissance 10 de l’“absurdie” dans laquelle nous vivons. Depuis le début de l’épidémie, l’incapacité dans laquelle l’État s’est trouvé de disposer de masques l’a conduit, au lieu d’encourager tous les Français à se protéger autant qu’ils le pouvaient, à nier l’efficacité des masques voire à déconseiller leur usage et à faire croire aux Français (mais qui l’a cru) qu’ils étaient trop stupides pour savoir mettre un masque.

Désormais, non seulement l’Organisation Mondiale de la Santé recommande l’usage massif des masques mais surtout les exemples des pays étrangers démontrent que ceux qui s’en sortent le mieux sont ceux qui ont distribué des masques à leur population et ont testé leurs population pour isoler les malades. Désormais, on sait que le déconfinement est impossible sans masques. Cela signifie que cette politique au minimum stupide sur le plan sanitaire va de plus être catastrophique sur le plan économique. En effet, le déconfinement sera gagné ou perdu à une échelle locale et les villes vont jouer un rôle majeur comme l’a rappelé Carlos Moreno qui, depuis le début de cette pandémie n’a cessé de suggérer de bonnes solutions qui n’ont été adoptées que très tardivement ou pas adoptées du tout. Il n’est donc pas surprenant de voir des villes, à commencer par la Ville de Paris et sa maire Anne Hidalgo, proposer une stratégie de déconfinement le 12 avril, l’État n’ayant pas été encore capable de présenter à l’échelle nationale une telle stratégie.

De même de nombreux maires, aujourd’hui, anticipent le déconfinement, notamment en prenant des arrêtés obligeant le port du masque sur leur territoire à partir bien entendu du moment où ils permettent à leurs concitoyens d’en disposer. Ce qui est intolérable c’est que les préfets n’aient rien de mieux à faire que de poursuivre les maires qui prennent des arrêtés pour obliger à porter des masques et qu’un tribunal donne raison à l’État en considérant que c’est une atteinte aux libertés. Certes, devoir porter un masque est une atteinte à la liberté, mais devoir rester chez soi est une atteinte aux libertés bien plus considérable et si la réduction de cette atteinte en passe par le port du masque obligatoire, merci le masque!

Les collectivités territoriales s’adaptent nettement plus vite que l’État jacobin. S’il existe deux catégories de masques -les masques de protection respiratoire (type FFP2…) pour la protection du porteur, les masques chirurgicaux (masques médicaux) pour la protection de l’environnement du porteur- dont la fabrication est fortement encadrée par un règlement européen, les maires de manière beaucoup plus pragmatique face à une absence de stock, prônent l’utilisation de barrières anti-projections dont l’efficacité ne peut être optimale qu’avec un usage généralisé.  

Depuis le changement de doctrine, chaque employeur, dont les collectivités territoriales, se doit d’avoir un stock de masques pour ses employés. Les collectivités n’y dérogent pas. C’est pour ça que depuis le début du confinement les agents d’entretien de la ville de Paris portent un masque. Ces stocks sont exclusivement limités aux agents.

Néanmoins, pour parfaire les stocks pour d’autres usages, les collectivités font appel à leur réseau pour importer des masques réglementaires. Il n’est pas étonnant dès lors de voir des présidents de région et des maires de grandes villes commander directement des masques. Ainsi, Jean-Pierre Hamon, président de la fédération des médecins de France estime: “Il y a eu une défaillance totale de l’administration centrale sur les masques, c’est normal que les présidents de régions et les maires se prennent en main pour en obtenir”. 

S’il est logique qu’il y ait un contrôle et une gestion des priorités collectives, la réquisition sur le tarmac des aéroports, sans avoir prévenu personne et après l’avoir nié, des masques commandés par des régions, n’est pas logique en dehors des masques FFP2 qui doivent être destinés aux soignants en priorité et dont le circuit de distribution passe par les organes centraux de l’État. 

Les différents reculs de l’État dans la protection des populations et l’incapacité d’un état central d’être prêt face à une crise et pire encore de reconnaître son impréparation sont lourds de conséquence. C’est pour cela que les collectivités se chargent de prendre le relais pour réussir le déconfinement en temps et en heure et c’est en bonne connaissance des territoires qu’elles ont la capacité d’amorcer un redémarrage économique solide.

Et pourtant ce n’est pas la stratégie envisagée, en effet celui-ci réduit autant que faire se peut le pouvoir des maires pendant que dans le même temps le gouvernement augmente ceux des préfets par un train de déconcentration accompagné d’une liberté quasi-totale de déroger à toutes les normes. C’est une hérésie économique, sociétale et politique.

Le caractère de plus en plus liberticide et antidémocratique du fonctionnement actuel de nos institutions est lourd de menaces pour l’avenir politique mais il est à très court terme catastrophique sur le plan de la lutte immédiate contre le covid-19, pour le déconfinement et le redémarrage de l’économie puisque grâce à cette politique, la France risque de perdre un ou deux mois dans la reprise par rapport à ses voisins immédiats qui ont beaucoup mieux géré qu’elle la crise (pays du Nord et Allemagne en particulier et bien entendu par rapport à l’Asie).

Soutenons nos maires et nos collectivités territoriales contre cet acharnement insensé.

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